Diocèse de Luçon

TROIS Questions

La nouvelle traduction du missel  romain

Pauline Gillard-Chevallier et Paul de Rugy

Ce premier dimanche de l’Avent marque l’entrée en vigueur de la nouvelle traduction française du Missel romain. Un petit évènement pour l’Eglise, fruit d’un long travail réalisé depuis une vingtaine d’années par des experts francophones. Cette nouvelle traduction a pour objectif d’approfondir le mystère pascal du Christ, qui se donne dans l’eucharistie. Les explications de Paul Craipeau, diacre permanent, et Isabelle Duclou, membres du service de la pastorale liturgique et sacramentelle dans le diocèse de Luçon.

1/ Pourquoi une nouvelle traduction du missel romain?

 Il faut rappeler en préambule ce qu’est le Missel romain. Il s’agit du livre destiné à la célébration de l’eucharistie, selon les normes en vigueur de l’Eglise catholique romaine. Il contient les textes de prière pour la célébration de la messe, le dimanche comme pour tous les jours de l’année. Il est organisé en plusieurs parties, selon la structure de l’année liturgique et des fêtes chrétiennes (Avent, Noël, Carême, Semaine Sainte et Pâques, Temps ordinaire), ainsi que des différentes étapes de la célébration de la messe. Pour chaque dimanche, un ensemble de textes est prévu afin de permettre à toute l’assemblée de partager une même prière et louange. Destiné en premier lieu aux ministres ordonnés, évêques et prêtres, qui président la messe, il est également au service de divers acteurs (diacres, musiciens et chantres ou fidèles laïcs) au cours de la célébration liturgique. Le missel est ainsi le fruit de la vie liturgique de l’Eglise qui, dès ses commencements, a exprimé sa prière et sa foi au travers de mots, de chants, de gestes et de prières. Progressivement, des textes sont apparus afin d’en conserver la mémoire et la richesse, mais également d’assurer ainsi la communion entre tous les chrétiens, par le monde.

 La réforme liturgique voulue et initiée par le Concile Vatican II a conduit à la promulgation du nouveau Missel romain le Jeudi Saint, 26 mars 1970. Depuis lors, la Congrégation pour le Culte Divin et la Discipline des Sacrements a procédé à deux éditions typiques en 1975 et en 2002, chacune d’elles apportant de légères modifications et ajouts à l’édition de 1970. Comme toute langue évolue avec le temps, diverses Instructions concernant les traductions des textes liturgiques ont été émises par les autorités romaines compétentes. En fait, les nouveautés les plus apparentes tiennent à l’effort constant de l’Eglise de faire évoluer le langage de sa prière, en ajustant les gestes et les formules, pour permettre la participation de tous les fidèles.

2/ Comment a été établie cette nouvelle version ?

C’est un travail long de plus de quinze ans, et qui avait été initié sous le pontificat du pape Saint Jean-Paul II. Ainsi, en 2001, l’Instruction «  Liturgiam authenticam  » invitait à remettre en chantier la traduction des livres liturgiques, dont le Missel romain. Pour Mgr Aubertin, archevêque de Tours, et président de la commission épiscopale francophone pour les traductions liturgiques (AELF), «  il s’agissait alors de garder en tête trois principes de fidélité au texte initial  : fidélité au texte original, fidélité à la langue dans laquelle il est traduit, et fidélité à l’intelligence du texte prié par les destinataires ». Les conférences épiscopales des différents pays francophones, des théologiens, des experts en langue, ont donc travaillé pendant de nombreuses années. Dès lors, après un travail de longue haleine et de multiples ajustements pour rester fidèles et exprimer de la manière la plus juste, claire et accessible la prière de l’Eglise, une nouvelle traduction du Missel romain a été adoptée pour les pays francophones. N’oublions pas que la langue de la liturgie est une langue du cœur. Elle mêle à la fois la poésie et ce que nous avons au plus profond de nous.

 Il s’agit maintenant de l’accueillir, comme cela a été déjà été le cas il y a quatre ans, avec la nouvelle traduction du Notre Père, entrée en vigueur le premier dimanche de l’Avent en 2017. Ce travail d’aggiornamento avait déjà été réalisé pour la nouvelle traduction des lectionnaires et de la Bible liturgique. Profitons de cette nouvelle traduction du Missel romain pour redécouvrir la beauté de la liturgie !

Nouvel traduction du missel romain

3/ Quels sont les principaux changements  pour les prêtres et les fidèles ?

En plus de la révision d’un certain nombre de prières, préfaces et dialogues rituels, une plus grande place est donnée au silence et à la gestuelle. À plusieurs endroits, des nouvelles rubriques précisent les gestes du prêtre et ceux de l’assemblée. Elles invitent à s’incliner lors de l’évocation du mystère de l’Incarnation dans le symbole de Nicée Constantinople et le symbole des Apôtres. Dans ce dernier, il est demandé de s’incliner de « Et en Jésus Christ, son Fils unique, notre Seigneur » à « né de la Vierge Marie ».

Dès la préparation à l’acte pénitentiel, la notion de «  mystère  » est revalorisée alors qu’elle était absente de la traduction précédente. «  Frères et sœurs, préparons-nous à célébrer le mystère de l’eucharistie, en reconnaissant que nous avons péché  ». «  Nous avons péché  » remplace «  nous sommes pécheurs », l’accent est donc mis sur l’acte plus que sur la personne. On prie la « bienheureuse » Vierge Marie  :«  Je confesse à Dieu tout-puissant, Je reconnais devant vous, frères et sœurs, que j’ai péché en pensée, en parole, par action et par omission. Oui, j’ai vraiment péché. C’est pourquoi je supplie la bienheureuse Vierge Marie, les anges et tous les saints, et vous aussi, frères et sœurs, de prier pour moi le Seigneur notre Dieu ».

Notons par ailleurs, que pour le chant de l’ordinaire, cette nouvelle traduction accorde une certaine place au latin, en proposant de chanter dans cette langue le Gloria, le Credo ou encore le Pater Noster. Dans le Gloire à Dieu, on privilégie le pluriel «  les péchés  » au singulier  : «  Toi qui enlèves les péchés du monde, prends pitié de nous, Toi qui enlèves les péchés du monde, reçois notre prière ». Au moment du Credo, dans le symbole de Nicée Constantinople, le terme «  consubstantiel  » remplace «  de même nature  ». Cela exprime l’identité de substance entre le Père et le Fils.

 « Je crois en un seul Seigneur, Jésus Christ, le Fils unique de Dieu, né du Père avant tous les siècles : Il est Dieu, né de Dieu, lumière, née de la lumière, vrai Dieu, né du vrai Dieu, engendré non pas créé, consubstantiel au Père, et par lui tout a été fait ». Des changements sont aussi à noter au moment de la prière des offrandes : « Tu es béni, Seigneur, Dieu de l’univers : nous avons reçu de ta bonté le pain que nous te présentons, fruit de la terre et du travail des hommes ; il deviendra pour nous le pain de la vie.

Tu es béni, Seigneur, Dieu de l’univers : nous avons reçu de ta bonté le vin que nous te présentons, fruit de la vigne et du travail des hommes ; il deviendra pour nous le vin du Royaume éternel ». Puis le prêtre est invité à dire ces mots : « Priez, frères et sœurs : que mon sacrifice, qui est aussi le vôtre, soit agréable à Dieu le Père tout puissant. Puis l’assemblée, debout, lui répond  : «  Que le Seigneur reçoive de vos mains ce sacrifice à la louange et à la gloire de son nom, pour notre bien et celui de toute l’Eglise ». Une nouvelle anamnèse permettra à l’assemblée de proclamer le kérygme : «  Qu’il soit loué, le mystère de la foi : Sauveur du monde, sauve-nous ! Par ta croix et ta résurrection, tu nous as libérés ». Par ailleurs, quelques mots ont été modifiés dans les autres acclamations d’anamnèse  : « Nous annonçons ta mort, Seigneur Jésus, nous proclamons ta résurrection, nous attendons ta venue dans la gloire ». Dans les rites de communion, outre le pluriel au moment de l’Agneau de Dieu, (« Agneau de Dieu qui enlèves les péchés du monde, prends pitié de nous »), l’invitation à la communion nous dévoile le mystère de l’Eucharistie comme celui des noces, de l’union du monde avec Dieu : « Voici l’Agneau de Dieu, voici celui qui enlève les péchés du monde. Heureux les invités au repas des noces de l’Agneau ! ».

 Lors du rite de conclusion, trois nouvelles formules sont laissées à la discrétion du célébrant : « Allez porter l’Evangile du Seigneur », « Allez en paix, glorifiez le Seigneur par votre vie », ou « Allez en paix ». En plus de ces modifications, une plus grande place est donnée au silence. Pendant l’acte pénitentiel et après l’invitation à prier, chacun se recueille ; après une lecture ou l’homélie, on médite brièvement ce qu’on a entendu ; après la communion, le silence permet la louange et la prière intérieure. Le silence fait donc partie de l’action liturgique et permet de mieux accueillir la Parole de Dieu.

 La nouvelle traduction rappelle également que la prière liturgique est une prière chantée. Pour cela, le prêtre est invité, s’il le peut, à cantiller les dialogues et les préfaces  ; l’édition de ce Missel comporte les musiques à la différence de la précédente.

ADL

Pour accompagner et expliquer ces changements de la nouvelle traduction du Missel romain, le diocèse de Luçon a organisé une journée à destination des prêtres et une soirée pour le grand public le 10 novembre dernier. Les paroisses vont ainsi mettre à disposition des feuillets avec les nouveaux textes pour les fidèles. Les éditeurs proposent aussi de nouvelles versions du Missel romain.